Des jeunes quittent Shanghai pour la campagne afin de s’y faire rééduquer (photo Roland Depierre)
Si la Révolution Culturelle démarre à Pékin (1966) et reste pilotée par le Groupe dirigeant de la capitale, le mouvement éclate en mille organisations querelleuses et jalouses de leur autonomie. Il s’étend à tout le territoire, tant dans le monde universitaire qu’au sein des banlieues industrielles. Shanghai, la mal aimée du régime, va s’enflammer idéologiquement et se désintégrer politiquement. Elle voit s’affronter Gardes Rouges et Rebelles Ecarlates par milliers, dans une véritable guerre civile. On y proclamera même « la Commune de Shanghai » (1967), héritière de la Commune de Paris de 1871. Trois des membres de la « Bande des Quatre » étant de Shanghai, la ville se posera en bastion du radicalisme sectaire, après la chute de Lin Biao et de Chen Boda. Son passé la désigne comme la ville où la bourgeoisie chinoise a connu son âge d’or, c’est donc sur ses quais et dans ses usines que « la lutte des classes » sera la plus violente, aboutissant à un régime totalitaire, militarisé et brutal.
Notre exposé partira de situations vécues à partir de la mort de Mao pour en retrouver le fil chronologique mais aussi les enjeux de la dernière utopie égalitariste du XXe siècle. Elle prétendait réduire les trois différences, entre paysans et ouvriers, ville et campagne, entre travail manuel et activité intellectuelle, mais ne sombra-t-elle pas dans une lutte à mort entre les vieux dirigeants ? La question de son sens, de sa portée et de son bilan reste ouverte pour les historiens.
Roland Depierre (Université de Nantes)
Espace Cosmopolis – Mercredi 9 mars à 18h30